Sad monks
N'écoutent que ceux qui ont fait le deuil de la peau comme rempart, et de tout rempart supplémentaire. Il y a ici un péril certain pour l'âme.
Le vrai guerrier est plus nu qu'on ne l'imagine.
Il faut savoir comme la peau ne protège de rien.
Je vous écorche tous en pensée pour vous éviter de mourir continuellement, je ne veux plus qu'on ignore sa stupeur.
Dans le monde de la solitude première, celui des hautes herbes sèches, le silence n'existe pas, non plus que les berceuses. Le bruit signifie le danger – sa rare absence, parfois, pire encore. La nuit est froide et on n'y fait qu'écouter.
Le danger de soi s'écoute comme celui de la savane pour les grands singes.
« Écoute, je connais ces choses et c'est elle l'image qui solidifie la nuit :
C'est la nuit d'avant l'histoire et il faut voir leurs visages quand ils écoutent ce qui feule dans le noir au fond des savanes, les voir marcher dans les hautes herbes la nuit, courbés et silencieux, tout entiers animés par l’impératif de passer une nuit de plus. C'est la traque immémoriale d'eux par leurs prédateurs, si proches. Je l’entends, moi dans tous ces cris arrivés sans médiation jusqu'à moi, par le sang, cette angoisse première, comme l’haleine chaude en bas des reins qui précède d’un instant long comme la mort l’arrachement ; dents de sabre, il n’y a plus rien au milieu de moi, plus de cette nécessaire mécanique du ventre, il n’y a plus que la fin, la fin. »
Lettre 16
Et je fraie, carnivore moi-même, avec mille mangeurs de chair.