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La marée

21.12.13

 

Je penche sur

la violence

comme sur cette cane que je n'ai pas achetée faute de confiance

en ma douleur

jusqu'à rendre la pente horizontale

Ô dormir du sommeil

d'une jambe de bois

du sommeil évidé de cette porcelaine

 

Un jour je n'ai rien fait que jouer à l'étal des coquillages

sur la table noire

pour perdre les strates d'étés pour

regarder longtemps

cette dureté de dent adulte qu'ont mes trésors

et j'ai fait semblant d'organiser par couleur

le microcosme

comme je passe mon temps à aligner dans l'ordre des cartes à jouer

 

Puis j'ai cherché leurs noms qui étaient introuvables

 

Des sciences enfantines il ne reste que

turitelle et natice

patelle coque et

porcelaine

 

Il y avait aussi des pierres des coraux et du verre et du bois

lisses à la paume et confondants pour l’œil

des choix spécieux de la mer qui rompt ou

qui lamine interminablement toute aspérité

qui arrondit l'angle aigu des brillances

 

La porcelaine poudrée rose

est minuscule comme l'ongle du petit doigt

son dos est plissé

de trop de temps dans l'eau c'est une peau humaine

et l'ouverture à son envers

a deux commissures comme certains yeux de Botticelli

et invinciblement rappelle un sexe de femme

Vénus d'ailleurs naît de l'écume

 

Et les mystères

fuient devant moi -- l'insigne que je désirerais porter

l'emblème que je choisirais

doigts gourds tendus vers le trésor

c'est la pince de crabe violacée granulée de blanc

qui semble une canine

 

J'appuie mon poids sur la violence

jusqu'à y gésir tout du long

 

Je n'ai jamais su faire peser convenablement les mots

 

La marée qui m'échappe est celle du sommeil



21/12/2013
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