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10.06.13

J'écris en haut du parking Wodli, à quatre heures trente du matin. La compagnie s'est essaimée depuis belle lurette. Éva s'est révélée n'avoir que dix-sept ans ; cas rare mais grave, sa famille est plus folle qu'elle. Ivre à n'en plus pouvoir, elle pleurait à pierre fendre. De fait, je suis gelée. Le chemin jusque chez sa mère a été long. On ne goûte plus une bouche telle, une bouche qui se dit douloureuse. Le ciel est violet ("La montagne devient violette"), et, du côté de Schiltigheim, en face de moi, il vire au bordeaux. Je connais déjà les bruits étouffés des voitures sur le boulevard, par quoi la ville, sensiblement, respire. La nouvelle Eve noire ne m'aura rien appris. 

La Négresse du Sacré Cœur l'année grâce du sacré cœur le mien

"Oh, pourvu que je tienne jusqu'à l'aube..."

Savoir déjà que l'aube n'est plus une véritable échéance, de quoi est-ce abdiquer ?

Je termine, attablée, un fond de bonne bouteille ; je peux, à la mesure de mon désir, emplir ma bouche de faux fruits confits. 

Deux passages très récents retrouvés dont le moment n'existe plus dans ma mémoire : 

De ma présence

du recel du geste

je fais une toile au lait de laquelle

tous s'émeuvent

et : 

L'absolu n'a pas de continuité et c'est là le pire de ce qu'on apprend des nuits de folie quelque chose se perd dans même la fièvre je suis malheureuse si la fausseté existe

Ciel bleu pervenche, cinq heures quatorze. 

Je disais à Éva : le temps passe tout seul, sans notre effort ; tu n'as pas encore une matière suffisante ni suffisamment stable pour un travail ; attends, ça avancera seul, simplement n'aggrave rien, tu vis déjà tant de cette façon-ci. Était-ce lâche ?

Ce que m'apprend Éva du Sacré Cœur ("allons, mon vieux complice", Pauvre Lélian), au fond, je le sais. 

Feule artifice -- pauvre les liant -- monde œil -- San trêve -- jeu fûmes

Acrostiche pour moi : Palabre nue.