Facilités nocturnes
Nouvelles aventures de la Volupté
01.10.13
Catégorie : facilité nocturne
L'acrobate soudain a laissé retomber
sa figure et ne se soutient plus. Cette chute
évanouit avec lui toute grâce, et la brute
se distingue, dans le corps obtus et bombé.
Est-il mort? C'est égal ; il ne peut plus jouer.
Le spectacle est fini, et avec lui la geste
devient imperméable. On oublie qu'il fut leste,
l'exultation promise à ce point déjouée.
Mon ventre sans désir est comme un noyau mort ;
Tout son centre est de corne aussi bien que son bord.
Je le porte comme un corps de pierre effondré.
Le noyau grumeleux, au jardin de l'enfance,
fleurant encore bon la plate pêche blanche,
se frottait longtemps contre un mur ou une planche,
devenait sifflet. La caisse de résonance
en était la place de l'amande, le creux
jamais rassasié. D'autres fois, c'est le cœur
lisse et brun d'une nèfle que fendaient, moqueurs,
une pousse insolente et son vert bienheureux.
Mon ventre sans désir est sans voix ni nature ;
sourdement mais sans trêve, il crie à l'imposture
et je le porte comme un trésor délabré.
20.09.13, P.B. - La Volupté chevauchant un spectre.
Début pour un "Cortège"
Il n'y avait pas
de fleurs empoisonnées
dans le jardin de mon enfance
le liseron seul
étendait sa robe que je pouvais aimer
innocente
Et j'aimais l'étrangleur
Je ne crois pas avoir aimé
couper dans sa souplesse
et c'était mon devoir
ouvrière du jardin de
le détacher des roses je
ne crois plus aux roses peut-être
aux liserons me disais-je
mais tout cela est simple il n'y avait pas
de fleurs empoisonnées dans le jardin
de mon enfance et le liseron même
n'étouffe aujourd'hui
qu'une voix déjà close
Et j'aimais l'étrangleur pour ce que j'étais
étrangleuse ce que je ne sais pas dire
je m'étranglais moi-même
et je me disais Paule il est temps que tu viennes
Et j'aimai l'étrangleur que j'ai moi étranglé
Je m'occupais des roses
au jardin de l'enfance je taillais leurs tiges
en biais pour que l'eau
ne les fasse pourrir
Paule
il est temps que tu viennes
Et les temps ne sont plus du jardin
Pour qui ne voulait pas manger
les éclats végétaux rien pourtant n'était
cruel dans
les lieux de l'enfance
Urbaine
Réécriture de "Marine" -
18.06.13
La ville sonore
éclate sous l’œil
de Diane, l'écueil,
et éclate encore
Tandis qu'un éclair
brutal – un vieux pitre –
ébranle ma vitre
d'un long zigzag clair
et que chaque pas,
en saut convulsif,
joue à être vif
avance, non pas
jusqu'au firmament,
que violence serre,
mais jusqu'à Cythère
formidablement.
Cursives à travers la fumée
05.04.13
Catégorie : facilités nocturnes
[...]
à moi tu n'es pas étranger
tes gestes c'est
le langage de mon oubli
le sens est
dessous comme
on respire sous la neige il faut
que je sois paroi douce douce
docile sous ta main ne
crois pas que je sois
si terrible
[...]
Je suis trouble sous les paupières
"Où est la clé des yeux fermés" (Apll)
28.03.13
Insomnie de quatre heures
"Anvers on bâtit une tour
Ville trompée un prince arrive
Dix fois de toi fera le tour
Toutes les mains à la dérive
Maigre comme un cou de vautour
Maisons deviennent des lumières
Des corps marchent sans intellect
On dira beaucoup de prières
Pour l'oeil un volatile infect
Naît soudain œufs tricentenaires
Des noms le mien est celui qui
A la saveur du laurier femme"
(« Anvers », Apollinaire, Le Guetteur mélancolique)
Oranger et poison pour hommes
voilà tout l'intérieur qui fume
et les mollesses qui s'allument
Comment fait-on déjà à Rome
Comme les Romains font eux-mêmes
Mélanger les cerveaux de Rome
Prier Tisane qu'elle assomme
Les fleurs fanées font une brume
elles ont leurs vapeurs Nous fûmes
Tout près si près de faire un somme
On récolte ce que l'on sème
et le brouillard et les poèmes
ridicules Veiller c'est comme
hurler parmi les loups à Rome
de grandioses syllabes blêmes