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Autoportrait


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Qu'est-ce que le corps essaie de dire - la gorge, le genou, les reins, le sang ?


06/11/2013
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De la facilité

A plusieurs : « [...] je n'ai pas un corps facile [...] »
 
Paule perpétuelle : « Suis-moi – et je suis massive,
pesante et rigide, concentrée en moi-même pour
que tu m'arrives, peut-être. Car je suis si facile qu'il
me faut trouver une manière de  t'éprouver, toi que
peut-être je désire. »
- Décembre 2012 -

 

IMG_0558.JPG

 

Q.V.,  11.08.13

J'ai envie d'avoir plus souvent - je l'ai ce soir, la fatigue aidant - le visage de cette photographie, l'air de gouaille sérieuse du capitaine rendu au large, et surtout l'imperfection de la peau et du corps, que l'on devine lourd à cause du menton qui ne fait pas, avec le cou, un angle très honnête. Je veux que l'on devine, à mon aspect, qu'il faut, pour que je sois aimable, un renoncement au lisse, à la beauté d'ordinaire. Puisque non, on ne peut plus m'aimer pour mes yeux seulement.

Mon corps apparu maintenant est celui qui me faisait dire, il y a un an de cela : je veux que l'on me cherche vraiment, puisque je suis trop facile, que je me donne trop entièrement et trop vite, parce que, simplement, te désirer m'intéresse. Et certes pour le vouloir comme je le souhaite il faut avoir fait son choix, sortir de son habitude, puisqu'il est aussi pesant d'apparence qu'il est pesant pour moi, avec ses lois propres et ses erreurs imprescriptibles et maintenues.

J'ai à nouveau un corps signe, devant lequel, d'abord, l'on est aussi rétif que je le suis, moi, profondément, lorsqu'il s'agit d'amour. Il a déjà eu cet aspect et me faisait peur alors ; il est redevenu celui-ci, le même selon toute logique, immaîtrisable, mais il m'arrive au moment où je peux l'habiter avec toute ma volonté de sens, et parce que c'est celui qui me dit le mieux le voilà harmonieux, vaste enfin aux endroits qui me coupent le souffle chez les femmes, plein – plein. Il fallait qu'il me ressemble tant pour qu'il ait cet équilibre insensé, il fallait qu'il soit vrai. Et c'est bien pour une autre raison qu'on le demande, et qu'alors on le trouve ; et on le demande, et on l'obtient, quand on nous connaît seulement, preuve qu'il est lisible.

Et, là-dessus, ce visage lui aussi malaisé.

Me désirer, c'est passer la douane. Je ne refuse rien à la nature ; qu'au moins, en traversant la frontière, les yeux fixés sur cette allégorie de moi-même que je me trouve être, tu me prouves valoir ma peine. Si tu ne pressens pas dans le corps ce qu'il peut devenir, nu et affolé, à vif, si tu n'es pas capable du corps que je donne, je suis du moins certaine que tu ne le prendras pas. Je n'ai pas besoin que tu le veuilles assez fort pour le prendre, qu'au moins tu ne puisses pas le faire à moitié. Et si, ça y est, te voilà au seuil, au seuil du geste pour me dire le désir à quoi je ne résisterai pas, alors tu ne peux pas douter que j'aie d'autres pénibilités que celle que tu franchis maintenant.

 

 

Je m'avise à l'instant, devant le miroir de la salle de bain, de ce que les yeux que je traîne depuis la photographie du capitaine sont ceux, non maquillés, accusant un premier fléchissement de la paupière, de ceux qui alourdissent l’œil passé trente ans.  


06/10/2013
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Ma peau s'abîme aux commissures des lèvres, elle est sèche et d'un brun rougeâtre sur plus d'un centimètre, vers le bas. C'est évidemment démentir le sourire ; c'est aussi que je festoie trop, dit le corps, au point qu'il me reste autour de la bouche le sang de la chair mordue. 


06/08/2013
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J'aime

état au 18.07.13

J'aime :

les poufs orientaux, les graffitis dans les toilettes des bars, les longs-sans-sucre, les grands rideaux rouges et ceux de dentelle blanche, les animaux un peu trop gros, les objets un peu miniaturisés, les rubans larges en tissu, le vieux porto, les tatouages de marins et ceux qui figurent des fac-simile de livres imprimés, les pieds, les chevilles et les poignets menus des filles, la voix des chats quand ils miaulent, les cigarillos non aromatisés, les 205, l'écriture manuscrite des autres, les couleurs du Guépard, les colliers courts aux perles rondes, essayer de dire, « le feu sacré », la camaraderie, les techniques d'étranglement au sol, les dorures, tous les nus de Schiele, voyager (voyager vraiment) en train, avoir du désir, le goût d'algue du thé vert, les adverbes, acheter des fleurs à une fille ou à un garçon, manger dans des bols, les yeux foncés, les couleurs sobres, les amis ivres, les nèfles, le nom des figures de style, m'asseoir par terre, la bière noire, l'odeur du paquet de café juste ouvert, la musique adolescente (HIM) en tant que fréquentée de longue date, écrire des cartes postales, les garçons aux cheveux trop longs, qu'on m'appelle Paule, l'odeur de l'hiver en avance, en novembre, le [m] de Maud, Manon et mangue, tâtonner dans l'opéra et la musique classique, qu'on veuille bien parler de soi, porter des pantalons d'hommes, la fleur d'oranger, conduire seule, l'étrangeté, les chaussettes colorées, les errances urbaines, surtout pieds nus, avoir quelques rares détestations, les effets de rime, veiller un appartement endormi, avoir sous la main ma propre bibliothèque, certains visages féminins de Botticelli, me coucher devant la cathédrale, les plantes grasses, chanter en faisant la vaisselle, les traits de construction laissés sur un dessin, « texte », la rigueur intellectuelle et les jeux de mots, les caméléons,  


18/07/2013
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1. L'autoportrait

D'où vient que l'on ait du mal à « incarner son visage » ?

Le corps visible dans le miroir est comme un déguisement. On me l'a donné, j'en hérite sans pouvoir en changer ; il a l'air d'avoir été arbitrairement choisi, et de s'être ensuite, simplement, habitué à ma taille. Mais puisque c'est sur moi que le choix s'est fait, puis affiné, le dehors a tout à voir avec le dedans, la surface est le miroir d'une partie du fond.



L'autoportrait tel que, d'instinct, je le pratique, débusque ce que Paule sait du corps, le pourquoi de ce qu'il est. C'est un travail de Paule ; elle ne tient, elle, qu'à sa perpétuelle enquête sur nous, et je ne comprimerai pas son espace. De ce « nous » bifrons, elle observe le tronc commun, qui est surtout ce corps que nous partageons et les gestes décisifs qu'il fait avec lui. « Je » est donc bien Paule.

Il se lit, j'imagine, dans une sorte de stupéfaction ; c'est une nébuleuse de sens qui, toujours, passait jusque là inaperçue. Et là où il y a une signification, souvent, il n'y a pas de légèreté possible. Pourquoi crois-tu que j'aie l'air si amène : moi aussi, j'oublie, à trop me voir, et trop peu toujours. Mon visage, tu le vois familièrement, et mon corps t'appartient aussi un peu, tu le fixes ; tu captes de moi une apparence aimable et tu t'y fais ta place. Regarde X., avec ses tics faciaux qu'il arrive à certains de ne pas remarquer : je n'ai même pas cela pour me raconter à toi sans y prendre garde. Tu as raison, d'ailleurs, de ne pas interpréter la surface ; il te manque de quoi interpréter justement, puis ce n'est pas ton travail. Je préfère que tu te loges à ton aise sans faire le plongeon à l'intérieur. Soyons gais ensemble, plutôt.



Il me faut, pour écrire un nouvel autoportrait, une traque longue et ardue : c'est un jeu de regard. Le secret n'a pas l'habitude d'être pénétré. Je m'assieds en tailleur sur le tabouret de piano en velours vert, devant la glace, à plusieurs reprises, parfois près, parfois loin, parfois vêtue et parfois nue, parfois immobile, tournant parfois, et parfois fumant, comme lorsque je me dessine. 

 


15/05/2013
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